Vous venez de publier votre dernier album : Quelle en est l’histoire ?
Mon album s’appelle Chauve(s).
Il raconte, sous forme de petites scènes déclinées sur une ou deux planches,
le quotidien de l’accompagnement d’une homme dans la maladie de la femme qu’il aime,
atteinte d’un cancer du sein. C’était au départ un projet à valeur de thérapie. J’avais besoin de parler de cet accompagnement, sans savoir vraiment à qui m’adresser. J’ai donc commencé à dessiner, tout naturellement.
Combien de temps vous a-t-il fallu pour concevoir et réaliser cet album ?
J’ai passé près d’un an et demi à travailler sur ce projet. Pas de façon continue. J’ai dessiné la première planche le 1er aout 2013 et l’album est sorti le 3 juin 2015.
La recherche d’un éditeur à été très longue, parce que je ne connaissais pas la fin de l’histoire. Je la dessinais au fur et à mesure que notre vie avançait.
Si vous travaillez avec un co-auteur, pouvez vous nous parler de cette collaboration ?
J’ai travaillé seul sur ce projet. Le scénario a été écrit par les jours passants.
Vous travaillez seul, quel « plus » cela vous apporte-t-il ?
Je ne sais pas s’il y a une grande différence entre travailler seul ou en collaboration avec un scénariste, un coloriste ou un autre auteur. Je n’ai pas retiré de « plus » ni de « moins ». Je travaille généralement à rythme, lent, posé, même si sur ce projet il y avait une notion d’urgence que j’ai tenu à garder tout au long des planches.
Quelle formation avez-vous suivi en tant qu’artiste et quel conseil donneriez-vous à ceux qui voudraient suivre votre exemple ?
Question difficile. Je n’ai pas de formation particulière pour le dessin, l’écriture ou le découpage scénaristique d’une histoire. Je fais les choses au feeling. J’ai toujours dessiné, même à l’école. Le seul conseil que je pourrais éventuellement donner serait de s’accrocher à ce rêve. Parce qu’un jour, tôt ou tard, il se réalise.
Pouvez-vous nous parler du tout premier album que vous avez réalisé et quel regard portez-vous sur lui aujourd’hui.
Chauve(s) est mon tout premier album édité. J’en suis très fier, bien que je trouve être passé parfois trop vite sur certains évènement, et que j’aurai pu raconter une dizaine d’autres moments de notre vie. C’est mon « premier bébé », il est forcément beau :) Il a reçu un accueil merveilleux lors de sa sortie en juin 2015. Et les retours, les critiques sont assez positifs dans l’ensemble.
Y-a-t-il une recette magique pour réussir un album… ou a défaut sur quel aspect de votre travail êtes-vous le plus attentif ?
Je ne pense pas qu’il y ai une recette magique, non. J’ai eu de la chance. J’aborde un sujet relativement grave (le cancer du sein) sous un angle qui n’avait pas été pris jusqu’ici. J’ai beaucoup communiqué sur les réseaux sociaux tout au long de l’élaboration du livre et j’ai été particulièrement attentif à ça, aux retours que j’avais, aux témoignages qu’on m’a laissé. Et toujours une grande pudeur, je crois.
Vous allez participer aux 8 èmes journées de la bd. Quelle genre de relation nouez-vous avec votre public lors des séances de dédicaces et avez-vous des anecdotes à ce sujet ?
Le rapport que j’ai avec mes lecteurs (lectrices, en majorité) est très intense. Le sujet touche énormément de femmes, et d’hommes. Souvent il y a des pleurs, des embrassades, des rires aussi, heureusement.
Comment travaillez vous et ou trouvez vous votre inspiration ?
Je travaille LENTEMENT. Je suis un escargot pour me mettre en route. En revanche, une fois démarré, je peux aller très vite sur la composition de ma page, l’encrage et tout ça. Disons que je suis diesel.
L’inspiration me vient du quotidien, tout comme pour mon travail de photographie. Je flâne et rêvasse beaucoup (ce qui avait le don d’exaspérer ma mère, lorsque j’étais enfant) J’attrape de petites choses, des petits bouts de trucs que j’intègre ensuite.
Selon vous la bd doit elle rester un pur divertissement ou peut-elle véhiculer des valeurs ou un « fond » qui vous sont personnels. Si oui, lesquels ?
La BD n’est pas selon moi une forme de sous-culture comme le pense encore beaucoup de personnes. Elle est créée par des gens formidables, qui ont chacun leur parcours, leurs références, leur culture propre. Bien évidemment elle peut véhiculer des valeurs fortes. Elle n’est rien d’autre qu’une forme narrative. Illustrée. Mais écrite, également. Documentée. Référencée.
Dans Chauve(s) je me suis basé sur le quotidien du couple que je formais avec cette femme pour raconté quelque chose de fort, un amour indéfectible, une force de caractère, un combat contre la maladie et surtout un espoir infini en des jours meilleurs.
Quel est l’artiste ou l’écrivain que vous estimez à la source de votre vocation et pourquoi ?
Il m’est très difficile de répondre à cette question. Lorsque j’étais enfant je lisais peu de BD, je lisais peu tout court. Mais je dessinais beaucoup. Je reproduisais des personnages (Tintin, Donald, Goldorak… Que sais-je) J’inventais des histoires que je dessinais sur des bouts de papiers. Les références sont venues plus tard, quand j’ai découvert Tramer et Jano, Margerin, Blutch, Goossens, Trondheim, Larcenet et j’en passe.
Sur quel projet travaillez-vous actuellement ?
Je travaille sur un projet qui devait au départ être le pendant de Chauve(s). Pas vraiment une suite, mais tous les moments que je passais seul chez moi quand je devais quitter la Bretagne pour m’occuper de mes propres enfants à Lyon. Et puis peu à peu le scénario a dérivé sur quelque chose de plus onirique, de plus personnel encore, de plus profond peut-être. Ce sera un album plus volumineux, en collaboration cette fois avec un ami scénariste.
D’autres projets se profilent à l’horizon, mais il est encore un peu tôt pour en parler.
Quel regard portez-vous sur votre parcours artistique : bienveillant, fier, critique… ?
Je suis plutôt critique et rarement satisfait. Comme beaucoup, je crois. Mais j’écoute quand même les retours qui me sont fait, et il semblerait que ça ne soit pas trop pourri. Alors je continue !
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Interview réalisée par mail le 05 février 2016 exclusivement pour les Journées de la BD